Interview Fabienne Rimoux, famille d’élevage de Nanou.
Quelles sont les raisons qui vous ont poussée à devenir famille d’élevage ?
Je n’y avais pas du tout pensé au départ. J’étais famille d’accueil de Nanou, qui était destinée à devenir chien guide. Elle avait tellement de qualités qu’elle est devenue chienne d’élevage, en espérant que la génétique parlerait, et que ses petits deviendraient d’excellents chiens guides.
J’avais déjà été famille d’accueil pendant un an, et je pensais m’engager à nouveau pour la même durée. Dès son premier stage à l’école, les qualités de Nanou ont attiré l’attention de l’équipe. Devenue rapidement une première de la classe, elle a passé des tests supplémentaires et l’École a décidé que ce serait une future maman de chiens guides.
Lorsqu’on m’a annoncé cette décision, il m’a été proposé de la garder. J’ai tout de suite dit oui, j’étais ravie, après avoir vérifié auprès de mon employeur que je pourrais toujours venir au bureau avec elle, évidemment.
Quand on prend un chien en famille d’accueil, on sait qu’à un moment, ça va s’arrêter. Et même si on le sait, c’est toujours un moment difficile… Quand j’ai appris qu’on pourrait continuer à vivre ensemble, j’étais vraiment très heureuse.
Parlez-nous de Nanou, maman de chien guide.
Quand on décide de devenir famille d’élevage, on n’a que des premiers de la classe, puisqu’ils ont été sélectionnés parmi les meilleurs. Nanou ne rencontre aucune difficulté au quotidien, elle surmonte sa sensibilité, elle est facile comme tout. J’aime bien dire que c’est le chien pour les nuls, celui qui fait tout bien, comprend tout, qui est intelligent, docile, obéissant…
En plus, Nanou est une maman super douce, super gentille avec les bébés ! Je n’y suis pour rien mais je suis très fière, c’est une maman incroyable. J’ai appris qu’à deux mois, ses petits étaient propres la nuit grâce à son enseignement, et j’étais un peu comme une maman très fière des performances de ses enfants.
Elle est d’autant plus incroyable que cet été, alors qu’une autre maman, Noya, était malade, elle a adopté ses petits en moins de cinq minutes. Elle s’est occupée d’eux pendant deux mois et ils sont vraiment devenus ses propres chiots.
Pouvez-vous expliquer vos missions et votre rôle ?
Il est important de préciser que quand on est famille d’élevage, on s’engage dès le départ à adopter le chien ou la chienne au moment de sa retraite et à lui assurer les mêmes conditions de vie qu’avant.
Au quotidien, on se dit qu’on est utile, que les bébés qu’aura notre chienne pourront guider une personne déficiente visuelle, donc d’une certaine manière, on sert cette belle cause. On sait qu’ils seront de formidables compagnons, grâce à leur éducation, mais aussi aux qualités de leur mère, qui continueront, je l’espère, à être transmises.
Lorsqu’on a une chienne d’élevage, on lui met un gilet « maman chien guide » pour sortir, et on nous arrête souvent dans la rue. On parle donc de notre mission, et ça me fait réellement plaisir de parler de ça au quotidien. C’est un peu comme si on avait un panneau publicitaire sur le chien, mais qui permet d’en parler ! Les gens sont curieux, c’est agréable et ça donne de l’espoir.
L’École demande régulièrement des nouvelles précises de la chienne pour vérifier que tout est bon du côté de sa santé. C’est primordial. Quand elle a ses chaleurs, je les tiens au courant, il faut s’organiser, l’emmener au CERCA si une portée est envisagée. Des examens doivent être faits pendant quelques jours mais ça reste peu contraignant ! Il faut simplement être disponible au bon moment, mais tout est prévu, sauf exception. Pour moi, il y a très peu de contraintes.
La chienne reste entre deux et trois mois au centre d’élevage pour s’occuper de ses petits. Je passe la voir une fois par semaine, puis c’est elle qui choisit lorsqu’il est temps de les quitter ; certaines sont plus à l’aise que d’autres à les quitter à leurs deux mois, d’autres restent jusqu’à leur départ en famille d’accueil. Quoi qu’il en soit, l’élevage respecte le rythme de chaque chienne.
Que vous apporte ce bénévolat au quotidien ?
La naissance des bébés est un moment joyeux et émouvant, et au quotidien on a la chance de vivre avec une chienne qui a énormément de qualités, c’est une compagne gentille, obéissante et en même temps très gaie ! Elle adore jouer, voir les copains. Comme toute personne qui a un chien, c’est très bon pour la santé, cela nous permet de sortir, de marcher. Il y a donc à la fois le côté chien guide avec ce sentiment d’utilité, et le côté super chien et compagnon d’exception.
Un souvenir ou un évènement qui vous a marquée ?
Quand Nanou était en apprentissage, à la maison elle dormait dans son panier, elle n’avait pas le droit de monter sur le canapé, mais je voyais bien que cela lui faisait très envie. Alors, quand j’allais me coucher, je mettais des tabourets et des obstacles pour qu’elle ne monte pas dessus. Lorsque j’oubliais de le faire, bien que je n’aie jamais vu Nanou sur le canapé, et qu’elle m’attendait le matin religieusement dans son panier, une place toute chaude sur le canapé laissait penser le contraire !
Quand elle a été confirmée chienne d’élevage, j’ai demandé si elle pouvait monter sur le canapé, et cela a été autorisé, les règles étant plus souples dans cette situation. Je me souviendrais toujours du bonheur de Nanou quand elle a pris place sur le canapé, elle était ravie !
Quel conseil donnerez-vous aux personnes qui souhaitent devenir famille d’élevage ?
De devenir famille d’élevage ! C’est génial, plus facile que famille d’accueil, et on perd la perspective de ne plus être avec son chien. J’ai été famille d’accueil, famille relais brièvement et famille d’élevage, et c’est incomparable bien que chaque forme de bénévolat soit belle et enrichissante.
On vit au quotidien avec un chien hors du commun, j’ai également eu la chance de voir grandir les deux portées de Nanou en plus de sa portée adoptive. C’est gratifiant, c’est magique, et en plus on se sent utile à l’association et à sa belle mission.
Mai 2022